2ème en IRC2 à la Morgan Cup

Thunder II est un proto 37 pieds (11,43 m) sur plan Mills Design, un cabinet irlandais très réputé dans l’univers anglo-saxon de la course en habitable. Avec sa largeur modérée, sa carène très équilibrée d’inspiration plutôt classique, son long bout-dehors rétractable, sa barre à roue de diamètre conséquent et « cette impression en regardant les lignes arrières que l’architecte vous en a donné deux mètres de plus », pour reprendre les termes d’un ancien rédacteur en chef adjoint de Voiles et Voiliers qui connaissait particulièrement son sujet, il a des fausses allures de J Boat. Très bien construit en 2000 pour un régatier anglais qui a glané succès et places d’honneur autant en équipage qu’en double, il est désormais aux mains d’un propriétaire russe installé à Londres, qui a fait appel à mes services comme coach et tacticien pour la Morgan Cup, une course offshore reliant Cowes à Dartmouth, sur la côte sud de l’Angleterre.

Thunder II à son ponton dans Hamble River : de faux airs de J Boat.

Si le parcours devait initialement couvrir 160 milles, avec une marque fictive à virer quelque part au milieu du Channel (nous Français parlons de « La Manche », les Britanniques disent « English Channel », étonnant !), les tous petits airs dû à un anticyclone bien présent conduiront les organisateurs du RORC à nous envoyer directement sur Dartmouth, pour 95 milles.

Dans ces conditions de vents évanescents et de prévisions un peu incertaines, il fallait savoir jouer – de mon point de vue – la prudence en privilégiant le CMG (Course Made Good), c’est à dire la meilleure vitesse de progression sur le parcours. Certains préfèreront tirer des bords à 70 degrés de la route, à la recherche probablement de brises nocturnes, mais aussi dans le plus fort du courant contraire, à hauteur de Portland Bill.

Pression supplémentaire au large, courant moindre, route plus directe ? Difficile de dire lequel (ou lesquels) de ces paramètres s’avèreront pour nous décisifs, toujours est-il qu’à l’approche de Dartmouth nous étions en tête de notre classe, avec la perspective des « honneurs de la ligne » comme disent les Anglais pour le premier bateau en temps réel, même si nous savions notre (lourd) rating impossible à sauver face à Scarlett Oyster, un Oyster 48 au palmarès impressionnant.

Empannage légèrement précoce sous peine de collision avec un chalutier, un dernier bord un peu trop travers au courant, la ligne d’arrivée est devant nous lorsque soudain le spi s’effondre. Sans avoir vu le coup venir nous sommes tombés dans la zone tampon entre les petits courants d’air sortant de l’embouchure de la Dart et le faible vent du large.

Voilà comment on se retrouve à mouiller en catastrophe pour éviter de se retrouver dépalé encore plus loin, tandis que derrière les autres – évidemment – tirent la leçon de notre mésaventure et ajustent leur empannage pour terminer portés par le courant. Adieu les honneurs, donc, mais en réussissant à repartir au premier souffle de brise solaire nous sauvons notre deuxième place de 15 secondes (après 22 heures de course) devant British Soldier, un X41 de l’association de voile de l’armée. Quelques bières amplement méritées, un dîner au buffet du Royal Dart Yacht Club, une heure de sieste et nous étions repartis en convoyage dans l’autre sens, pour finir notre après-midi d’un superbe dimanche d’été sous code zéro dans le Solent.

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